Une Chanson en Tête, le blog

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15 octobre 2022

Dans le cadre de « Handicap en scène » (activité proposée dans le secteur Ateliers & créations)

Histoire d’une création : RECTO & VERSO

Recto et Verso est une comédie musicale et vidéo crée par Une Chanson En Tête avec 16 jeunes handicapés de l’association Meuphine sur une période de 18 mois (de fin 2017 au printemps 2019).

Le thème :
Quand tout est gris autour de soi, on se sent soi-même uniformément gris.  On s’habille en gris, on travaille dans l’usine grise de poulets… gris. On va au restaurant gris manger du poulet… surveillé par un big brother gris.
Pourtant, il existe une faille. Et certains y découvriront un monde joyeux tout en couleurs.
Parviendront-ils à y entraîner leur grisâtres camarades ?
Comment aborder un monde joyeux, apprendre à sourire, se libérer des contraintes inutiles ?
Quel regard porter sur ce qui est différent, qui nous est inconnu ?

Du Théâtre, de la chanson, de la vidéo, de quoi épanouir tous les talents.
La réflexion grâce à l’humour et la poésie sur un sujet important : Quel regard portons-nous sur nos différences ? Et sur le handicap ?

Ci-dessous, on vous raconte TOUT ! Mais tout d’abord, nous vous proposons de visionner cette première séquence vidéo ci-dessous pour vous mettre en appétit. Elle comporte un clip chanson, une de celles que Casoar a composées sur mesure pour Recto et Verso, et a été tournée avec les comédiens par Marie Laverre. Les arrangements sont d’Hervé Coury. Ainsi, vous entrerez instantanément dans l’ambiance de cette comédie musicale et vidéo.

Survol du scénario

Signé par Marie Laverre (vidéo) et par Hélène Benveniste (théâtre)

Un monde gris bardé de technologie. Tout le monde est surveillé et surveille tout le monde en permanence. Au travail, chez soi, dans la rue, des écrans diffusent des messages. Les habitants « fonctionnent » grâce à leur précieuse batterie et leur processeur.
Si l’on n’est plus performant, direction La Grande Poubelle, une machine qui fait disparaitre les indésirables.
Dans ce monde gris, Pierre cumule deux boulots : manutentionnaire à l’usine de poulets gris et serveur au restaurant de poulet gris. Oui, dans ce monde-là, on ne mange que du poulet gris. On s’habille en gris. On voit la vie en gris…

Depuis quelques temps, Pierre fait un rêve étrange. Il rêve en couleur. Il est en retard au travail et il est de plus en plus maladroit. Résultat ? Il est viré ! Et recherché par la milice pour nourrir la Grande Poubelle.

En tentant de s’échapper, il bascule dans une faille spatio-temporelle dans un monde tout en couleur peuplé de gens joyeux. Il découvre, un peu hébété, ce monde et ses habitants heureux et fou-fous qui lui rappellent ses rêves.

Pierre n’a alors qu’une idée en tête : changer de vie.

Les chansons placent le personnage dans la situation

Elles sont écrites par Casoar, pour ponctuer des moments forts de la pièce ou du film.
Elles donnent corps au personnage et le comédien doit se les approprier.

L’auteur et compositeur tient compte des capacités vocales de l’interprète : tessiture, souffle, articulation… seront les guides pour trouver la mélodie, le rythme, le tempo et le texte.
Tout en mettant en valeur l’interprète, il faudra refléter l’action dans la scène.
Ce sera donc du sur-mesure.

Ensuite, c’est en studio que l’habillage sera réalisé avec des arrangements qui valoriseront les voix.

Play-back ou live ?

Une chanson a été enregistrée en studio, chant et orchestre, pour réaliser un clip qui fait partie du Monde joyeux.
Les autres ont été interprétées en direct accompagnées par des musiciens (guitare et clarinette) ou par une bande orchestre studio, arrangées et enregistrées par Hervé Koury et Casoar.

L’avantage de chanter en direct et d’être accompagné par des musiciens est que ceux-ci nous guident mais peuvent aussi nous rattraper si nécessaire, ce qu’on ne peut demander à une bande son, si riche soit-elle. C’est pour cela que les bandes son accompagneront plutôt les chansons de groupe, moins risquées.

Les chansons de Recto et Verso sont de styles très différents les unes des autres. Il y a des chansons tendres, drôles et dures aussi. Pour celles-ci, il a fallu juste prendre un peu de recul, surtout si la chanteuse est d’un naturel doux et romantique ! Et puis les choeurs sont là pour tout arranger.

La vidéo : mon image et mon rôle

Le tournage. Sur fond vert

Travailler avec l’image, c’est aussi travailler sur l’image de soi et ce qu’elle nous renvoie.
Chacun de nos comédiens réagira différemment en fonction de sa personnalité et de son handicap.

Les comédiens évoluent devant un écran vert, sans décors. Il leur faut donc imaginer les situations, circonstances et environnements dans lesquels ils se trouveront dans le film.
C’est au montage que Marie Laverre, la vidéaste, va détourer les personnages et greffer autour d’eux les décors et effets spéciaux de la scène. Ils se découvrent ensuite sur grand écran et doivent apprivoiser leur image, car ils vont devoir aussi jouer sur scène sans être perturbés par la diffusion du film, et mieux, jouer avec.

Tout essayer !

Chaque comédien a été tour à tour technicien : à l’image, au son, aux réglages, au script et même au clap. Cette découverte des techniques professionnelles les a passionnés.

Le tournage, ensuite, en réel et en extérieur leur a semblé un jeu d’enfant.

Les répétitions

Travail sérieux et plaisir !

Un double groupe pour un travail en commun
Après le succès des deux premières créations avec le groupe de l’association « Meuphine », celui-ci s’est considérablement agrandi. Pour Recto et Verso, 16 comédiens se sont proposés. Nous les avons répartis en deux groupes distincts. Seuls deux comédiens travaillaient dans les deux groupes.

Trois univers de répétition ont été créés par Une Chanson En Tête

  • Un groupe « usine de poulets gris »
  • Un groupe « restaurant de poulets gris »
  • Les deux groupes réunis pour un travail en commun (sur des scènes de rue…)

Et chacun d’entre eux a participé aux tournages vidéo, en intérieur comme en extérieur.

Pour faciliter une bonne compréhension de l’histoire dans le jeu, nous avons au maximum respecté la chronologie, et ce, même pour les séances de tournage.

Certaines répétitions ont rassemblé tout le monde, surtout vers la fin puisque nous approchions de la générale, et donc du spectacle. Ces instants avaient quelque chose de magique quand chaque groupe découvrait le travail de l’autre.

Evolution des répétitions au fil de la création
Les premières séances ont été dédiées au thème de l’histoire. Beaucoup de petites improvisations, tant sur le déroulé de l’histoire que sur une approche du contraste entre le Monde gris et le Monde joyeux.
Tout cela a permis la répartition des rôles et donc la constitution des groupes.

Ensuite est venu le temps de la mise en scène. Au fur et à mesure, les musiques et les chansons ont été intégrées avec un petit groupe de comédiens aux percussions. Batterie, agogos et jembés accompagnaient la guitare pour l’ambiance de l’usine, par exemple.

Les séances de tournage ont permis aussi aux comédiens de s’initier aux différentes disciplines du film (cf dossier vidéo). Ceci les a d’autant plus motivés pour jouer face caméra.

La régularité des répétitions et l’assiduité ont permis de ne pas oublier le travail accompli.

C’est aussi chronologiquement que les décors, les costumes et accessoires faisaient leur apparition aux répétitions (les parents ont été sollicités).

Les comédiens chanteurs
Selon les handicaps, certains d’entre eux apprenaient leur texte et leurs chansons à la maison entre deux séances, d’autres fonctionnaient plus facilement à l’identification ou à l’assimilation sur le moment et c’est la « répétition » des scènes qui rendait naturelles leurs interventions.

Le plaisir
Oui, c’était sérieux. Un véritable travail. Mais dans une telle bonne humeur que les jeunes comédiens attendaient avec impatience de retrouver leur « bande » et les artistes intervenants ainsi que les quatre personnes bénévoles qui les encadraient et jouaient également un rôle : Aurélie Fort, Sabrina Fort, Kathlyne Lecoeur et Claudine Simon.

Une approche du professionnalisme, et la satisfaction pour tous d’avoir apporté sa pierre à la création du spectacle.

Les décors et accessoires

Décors peints ou décors vidéo ?

Le monde gris
Dans une pièce où on oppose un monde gris à un monde joyeux, les décors doivent trancher. Mais chez nous, le traitement du monde gris est caricatural et satirique.
Nous avons construit pour la scène du restaurant un guichenot passe-plats au nom de « GREY CHICKEN PUB ».
Meuphine a de son côté dégoté une vingtaine de poulets en caoutchouc qu’il a bien fallu peindre en gris, les pauvres.

Une Chanson En Tête a dans son équipe quelques graphistes et peintres. Pour la scène de l’usine, c’est avec un spécialiste du trompe l’oeil, Jef Berry, qu’une fresque de 3,5 mètres de long représentant les pattes des sept robots a été réalisée. Avec un discret repère, chaque comédien robot pouvait se placer rapidement derrière ses propres pattes.

Des flashes vidéo publicitaires vantaient de discrètes batteries « Energie du désespoir » de 15cm3 (à glisser sous la peau), des barils de lessive qui lave plus gris que gris, des crèmes de beauté pour un beau teint gris…

C’est lors des répétitions qu’il a fallu apprendre à manipuler ces éléments de décors fragiles.

Le monde joyeux
Pour le monde en couleur, l’association artistique « La MALT » exposait des sculptures très originales au Conservatoire Couperin où avaient lieu nos répétitions. Nous avons pu, avec son accord, tourner en extérieur dans la cour, elle-même décorée de street-art très coloré et d’une multitude d’objets insolites…
Tout était réuni pour notre monde fou-fou.

L’écran géant en fond de scène
Séquences Monde joyeux : Projection des scènes filmées en extérieur et des scènes filmées en intérieur sur fond vert, montées ensuite avec décors et effets spéciaux.

Séquences Monde gris : Des messages permanents de rappels à l’ordre moralisateurs, des appels à la délation, des publicités et de la propagande du monde gris.

Les costumes
Ils ont été choisis par les comédiens et leurs parents.
Chacun devait se choisir un costume gris le plus neutre et tristounet possible.
Quant aux costumes en couleurs, tous les délires étaient permis, ou plutôt encouragés : lunettes, perruques et fanfreluches de tout poil pouvaient surenchérir.

D’ailleurs, ci-dessous, cette séquence vidéo projetée en fond de scène sur l’écran géant pendant le spectacle vous dévoile une partie de ces costumes, mais aussi le deuxième voyage vers le monde joyeux qui a pour but d’éviter aux comédiens le triste sort d’être dévorés par la Grande Poubelle.

Le spectacle

Solidarité pour gagner
On le savait. Donc, avant la représentation, on se retrouve dans les loges pour des exercices vocaux, respiratoires et tout ce qui peut nous détendre pour oublier qu’on l’a quand même, le trac.

Ensuite, costumes et maquillages, dernière étape avant l’arène, mais dans la tête, on est déjà sur scène. Alors on rigole, on parle de la pluie et du beau temps pendant les présentations, et le rideau s’ouvre.

Bien sûr, tout ce qui a été répété n’est pas toujours exactement rendu au mot près. Mais justement, lors des répétitions, une part importante a été laissée à l’intention du texte plus qu’à l’exactitude de chaque mot. La situation est jouée avec d’autant plus de naturel. Et tout « fonctionne ».

Tout fonctionne ? Oui, aussi parce que les lumières nous aident à nous placer et donnent des ambiances qui rendent nos actions plus évidentes. On oublie nos micros serre-tête ou cravate mais on retrouve nos voix dans les retours et on entend très bien les musiciens ou la bande son.

On n’a plus qu’à penser au défilé chronologique de ce qui doit nous arriver dans ce scénario qu’on a apprivoisé tout au long des répétitions.
Les réactions du public, loin de nous perturber, nous portent dans nos rôles. « Attention au cabotinage, n’en faites pas trop… ». Bon.

Pour le final, on est tous sur scène avec notre chanson qui résume toute l’épopée et que le public reprend avec nous. Là, on s’éclate.
On sait qu’on a gagné !

Les structures partenaires

Qui ont contribué à Recto et Verso

Une Chanson En Tête (collectif d’artistes qui dédient une part de leurs activités aux publics dits fragilisés)
L’équipe d’Une Chanson En Tête était composée de Marie Laverre, vidéaste, d’Hélène Benveniste, auteur et metteure en scène, et de Casoar, auteur compositeur, de Hervé Koury musicien arrangeur et ingé-son, Jean-François Berry, décorateur.
Pour la partie technique, Jean-Marc Molinès aux lumières et François Olivier au son.

Meuphine (changer le regard sur le handicap)
c’est le but de cette association créée en 2003 par Nadine Vallet, qui regroupe aujourd’hui plusieurs familles avec des enfants handicapés qui unissent leur énergie, leurs idées, pour préparer l’avenir de leurs enfants (l’intégration en milieu ordinaire (scolaire, culturel, sportif, professionnel…).

Recto et Verso est le 3ème spectacle que nous créons pour et avec Meuphine.

Le CRTH (Centre Recherche Théâtre Handicap), dir. : Emilie Bougouin
Il a pour objet de favoriser l’accès de tous à la culture et notamment les publics en situation de handicap. En 2015 il a rejoint le groupe SOS Solidarités.

C’est en 2014 que le CRTH a mis Meuphine en relation avec Une Chanson En Tête. La suite est une des plus belles aventures qui soit, pour les jeunes handicapés comme pour tous les intervenants.

Le Conservatoire Couperin de Tournan en Brie
Il a mis, dès la première création en 2014, les salles et le matériel nécessaires au bon déroulement des répétitions.